Christian Philibert, pédagogue des intelligences multiples |
Travailler avec ses intelligences multiples
Pour la cinquième année consécutive, le séminaire de jeunes
de Walbourg a accueilli l’université de printemps sur le thème des intelligences
multiples. Plus de cent personnes, chef d’établissements, enseignants
éducateurs et parents ont répondu à l’invitation du laboratoire pédagogique de
l’Enseignement catholique Alsacien (*).
Samedi 11 avril 2015 à 10h, Patrick Wolff le directeur diocésain de l’école catholique
a ouvert ces deux journées de travail, félicitant les inscrits de venir de
prendre du temps sur leur temps libre, saluant les membres du laboratoire
pédagogique qui ont porté ce projet ainsi que le Chanoine François Geissler,
représentant de l’Eglise d’Alsace. « Je suis très heureux de ce que nous
allons vivre durant cette université. Elle rassemble des chefs d’établissement, des
enseignants, des personnels et des parents. Elle est dans la logique du statut de
l’enseignement catholique, puisque tout le monde participe à la mission
d’éducation. » Il a ensuite remercié Christian Philibert, spécialiste des
intelligences multiples, au service de la pédagogie et de la classe. Ancien
professeur de lettre, formateur de l’enseignement catholique, venu d’Angers, ce
dernier sillonne la France, s’expatrie régulièrement au Canada et en Finlande
pour travailler à l’école du futur.
Durant les deux journées, il a proposé trois conférences.
Une première sur la question des intelligences multiples, une deuxième
reprenant les éléments nouveaux des neurosciences, une dernière enfin précisant
comment il était possible d’utiliser les progrès des neurosciences au cœur de
la classe, illustrant ses propos par de nombreuses expérimentations.
Notre cerveau se
modifie sans cesse…
Lors de l’université de printemps 2012, c’est sa collègue
Pascale Toscani, psychologue et chercheuse qui avait posé les bases de cette
réflexion. Les concepts de plasticité cérébrale, de neurogénèse et de
synaptogénèse sont rappelés, les neuromythes évoqués.
Pour entrer dans le vif du sujet, un exercice a permis à
chaque participant de tester ses huit
intelligences. Le test n’a rien de scientifique, et l’objectif n’est pas de
coller des étiquettes à chacun, mais de faire une photo du moment.
Tester ses intelligences multiples pour trouver ses points d'appui |
« On parlait toujours de profil d’apprentissage, on
disait : on est né comme ça. Nos cellules se renouvellent continuellement,
mais les organes poursuivent leur programme. Pour le cerveau, c’est différent.
L’homme a 180 milliards de neurones au départ. Il va en perdre (élagage), c’est
cela qui fait nos différences. Au court de sa vie, l’homme va aussi fabriquer
des neurones en fonction de ses besoins. Il fabriquera des connections
neuronales, quand elles sont créées, le cerveau ne fonctionne plus comme avant…
Cela nous permet de dire que la logique des programmes scolaires est totalement
inappropriée. Le travail par objectif est adapté aux récentes connaissances du
cerveau. » L’homme dispose donc de huit formes d’intelligence
(linguistique – logicomathématiques – visuelle et spatiale – corporelle et
Kinesthésiques – musicale – naturaliste – interpersonnelles –
intra-personnelles). Christian Philibert qui s’appuie sur les travaux de Howard
Gardner insiste : «Tout le monde possède ces huit intelligences, et chacun
peut les développer. Les intelligences fonctionnent en corrélation et il y a de
nombreuses manières d’être intelligent dans chaque catégorie. » Il précise
encore que les tests de QI ont peu de valeur, ne testant que deux des
intelligences.
Il a illustré les huit intelligences, avec des exemples
d’activités, vécues dans différentes classes.
Dans une deuxième conférence, après un temps de forum, qui a
permis à quatre établissements alsaciens de présenter une expérience dans le
domaine, Christian a proposé des démarches possibles en classe.
Ce qui est
possible en classe
Christian Philibert a rappelé que pour tester les
connaissances, le stress n’apporte rien. L’interrogation « surprise »
n’a donc aucune utilité. S’appuyant sur des exemples comme le Canada, la Finlande, mais aussi le collège
Saint Charles à Angers qui est en expérimentation autour des neurosciences, il
a partagé un changement de posture. La classe traditionnelle, avec le
professeur face aux élèves évolue vers une classe à îlots, où le professeur
favorise des démarches coopératives. Pour les mathématiques comme pour d’autres
matières, cela fonctionne très bien. Les élèves sont actifs, cogitent, et
souvent le frein de l’un dans une démarche de recherche est déverrouillé par la
méthode d’un autre camarade.
De manière immédiate et n’imposant pas une révolution, les
intelligences multiples permettent de différencier les facettes de l’apprentissage.
L’enseignant peut observer son propre fonctionnement, pointer ses intelligences
dominantes, prendre conscience qu’elles peuvent être des points d’appui pour
enseigner. Il observe également le
fonctionnement de chaque élève. Citant Olivier Houde, il souligne l’importance
de faire émerger des représentations et donne l’exemple des «mind-map» ou
cartes heuristiques. Le savoir se construit de façon didactique, et
l’utilisation de plusieurs intelligences gagne en efficacité. Quand un
enseignement est distribué, il faut inventer des feed-back sous différentes formes.
Le propos était illustré par de nombreux et riches exemples.
Le travail sur les erreurs est primordial, car apprendre,
c’est aussi résister à des réponses instinctives.
Apprendre ou
résister ?
Le dimanche, avant une table ronde qui a permis de partager
différentes mises en œuvres, il a poursuivi le travail en parlant de l’inhibition cognitive. « Réfléchir,
c’est résister à soi-même » disait-il encore en citant Olivier Houdé.
Quant un élève a appris quelque chose, et que 15 jours plus tard il a oublié,
c’est qu’il a juste oublié d’inhiber la première représentation qu’il avait sur
le sujet. La première réponse est souvent instinctive. L’apprentissage permet une
deuxième réponse. Il faut résister pour ne pas revenir à la première réponse.
Dans la consolidation des apprentissages le sommeil joue un
rôle inattendu. Le cerveau travaille pendant le sommeil. Il met en ordre les
nouveautés enregistrées.
Pour les participants, cette université de printemps était
nourrissante, passionnante, et à revisiter. Le laboratoire pédagogique
proposera dès l’année prochaine une suite dans cet énorme chantier. La
direction diocésaine et heureuse de compter cette dynamique pédagogique au sein
de ses rangs.
La sixième université de printemps est annoncée. Elle aura
lieu les 23 et 24 avril 2016. Le sujet sera celui de la morale à l’école.
L’enseignement Catholique a déjà fait tout un travail dans ce domaine.
Jean THOMAS
(*) Pour l’organisation de ces journées
de printemps, une partie du laboratoire pédagogique était active : Martine
Hausherr de la DDEC (Direction Diocésaine de l'Enseignement Catholique d'Alsace), Véronique Pointereau, chef d’établissement du séminaire de
jeunes, pilote du laboratoire, Olivier Thomas, chef d’établissement du collège
Saint André à Colmar, Dominique Bérion, chef d’établissement au lycée
professionnel de Carspach et Anne Ehret, chef d’établissement du collège Sainte
Marie à Ribeauvillé.
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